Episode 2 : Que vaut mon diplôme ?

20 décembre 2021

La magie de l’événementiel

Il est très fréquent que je sois sollicitée pour des enquêtes métiers depuis la création de Coézi. Les demandes ont augmenté pendant les périodes de confinement d’ailleurs et notamment, des étudiant·es en panne d’entreprise pour leur alternance ou dans une volonté de réorientation d’études. Si cette enquête est rondement menée et préparée, elle aboutit a de bonnes pistes de réflexion.

J’y réponds souvent avec plaisir. Je trouve que faire la démarche de se renseigner sur des métiers et comment certain·es le vivent est intéressant pour confirmer une voie. Mais aussi pour ouvrir des portes que l’on imaginait pas ou bien infirmer un choix que l’on pensait juste. Il est d’ailleurs fréquent que mon interlocuteur·rice finalement ne sais pas vraiment en quoi consiste mon job.

Moi-même, lors du 1er confinement, je me suis demandé quel est le sens de mon métier dans un moment comme ces derniers mois. Quel est le sens de notre secteur d’activité, il y a t-il un avenir… ? Surtout quand je suis totalement coupée de ce qui m’anime au quotidien : être en lien avec des participant·es au cœur de l’effervescence.

Je voudrais faire votre métier quand je serai grand·e

Souvent, ce sont des envies qui naissent chez mes « interviewers » parce qu’iels ont vu passer des infos, ou parce que les personnes suivent des entreprises comme la mienne. Voire même tout simplement ont participé à des événements et veulent savoir comment on en devient une entité organisatrice. Mes « interviewers » me racontent leur parcours et le pourquoi de la démarche et j’entends souvent un besoin de reconversion, de bifurcation dans les études, de remettre du sens dans un job qui n’en a plus pour eux…

Etant au contact d’étudiant·es dans le secteur de la com, du tourisme et de l’événementiel, je n’avais jamais vu autant d’inquiétude dans le regard que sur ces derniers mois. Est ce que je fais bien de continuer mes études dans la com et l’événementiel ? Est ce qu’il y a une suite pour moi une fois mon diplôme obtenu dans ce secteur ? Ne suis-je pas en train de perdre 2 ou 3 ans d’études alors que le métier va peut être mourir étouffé par le contexte sanitaire et les restrictions changeantes ?

Si je peux éclairer quelques personnes par ce billet, alors je vais vous parler un peu de la façon dont je vois les choses et le parcours que j’ai eu.

« Ce n’est qu’un papier »

La première chose que je peux affirmer c’est qu’un diplôme ce n’est qu’un papier, ce n’est pas ton avenir. D’autant que je ne connais aucune école qui forme à l’événementiel. Elles forment généralement à la communication événementielle et mon métier n’est pas transmis par les écoles. Donc, plus encore, un diplôme ne définit pas ta voie à choisir ou ne t’emprisonne pas dans un secteur. Il est une étape à un moment de ta vie, où tu as pu acquérir des connaissances, des formations professionnalisantes parfois, du contact avec des pros, un réseau, voire même comme tout étudiant·es qui se respecte, une bande de buddy pour la vie.

Et puis ensuite, tes pas continueront. Tu as appris à marcher, et à lire et à écrire et tu n’en es pas resté·e là. Si ? Bon. De même que si tu adhères à un club sportif, un loisir culturel, tu peux choisir d’en faire quelque chose ou de clore cette page du livre pour en ouvrir une autre à tout moment. Parce que tu n’es pas joueur·se de badminton, à vie ! Le diplôme ne définit pas ta carrière. Il est juste une étape de ton apprentissage.

Métier en perpétuel mouvement

Il y a 20 ans quand j’ai fais mes études en com, l’événementiel ne se faisait pas. Ce n’était qu’une petite section d’un chapitre de la formation en communication, on nous a clairement annoncé la couleur. Le discours tenu était : « Vous vous formez dans un secteur qui est bouché depuis les années 80 car très prisé, partir sur Paris peut ouvrir des portes, si vous avez de la chance, un poste se libère une fois dans l’année et vous serez 300 à postuler. » Et pourtant, je travaille toujours dedans depuis 15 ans.

Nous sommes acteur·rices de ce que nous choisissons, et le métier que je fais actuellement n’existait pas il y a 20 ans. Le team building se résumait à une sortie en rafting ou un saut à l’élastique et on regardait qui était assez brave pour faire ces activités, soit disant de cohésion. Nous sommes nombreux·ses à avoir fait évoluer le métier. Tu feras sûrement partie de ceux là également. A imaginer ton poste, réinventer le job, saisir des opportunités. Le métier n’est pas mort. Peut être qu’il ne sera pas comme on l’a connu ces 5 dernières années, mais qu’à cela ne tienne, on le fera revivre de ses cendres sous une autre forme de Phénix.

Diplômée d’un BTS Communication des entreprises, je suis ensuite partie à l’université en InfoCom spécialisation NTIC. J’ai effectivement été confrontée au manque de poste, et les traditionnels arguments sur ma jeunesse et mon manque d’expérience 😊Ne serait-ce parce qu’il n’existe pas à ce jour de diplôme qui forme « concrètement » à l’événementiel. C’est très théorique, cela prend souvent la forme de Chargé·e de projet événementiel, qui est un métier transverse qui peut être adapté dans beaucoup de secteurs d’activités, sans véritablement y intégrer les spécificités terrain de notre métier.

On se construit à chaque pas

Je pourrais te dire comme ces grands orateur·rices que j’en ai toujours rêvé depuis l’enfance. Mais enfant j’ai voulu être serveuse dans un resto ou tenir un bar, prof d’histoire, archéologue ( fan d’Indiana Jones… ), et puis journaliste. Et pas une seule fois, je ne voulais bosser dans l’événementiel. Pourtant, j’ai baigné dedans sans y faire attention.

Je prenais part à l’orga des fêtes familiales car dans ma famille, on aime le sens du spectacle, avec une déco, un thème, avec un super menu, avec des jeux, une animation, du chant, parfois même de la musique en mode DJ… Mes parents étaient très investis dans l’asso de l’école et ont organisé les différentes fêtes de l’école pendant plus de 15 ans. J’adorais l’effervescence à la maison, avec la compta des stands que tenait ma mère, tous ces gâteaux, bonbons, les courses à faire, toutes ces personnes qui défilaient dans la maison pour donner des coups de main, emporter du matériel… et mon père qui imaginait et construisait des jeux et stands d’animation de toute pièces en bricolant dans son sous sol. Et à dire vrai, l’événementiel n’avait pas la réputation d’être un « vrai » métier car trop saisonnier.

Une fois mes diplômes en poche, une opportunité s’est présentée. Que j’ai prise. Manager sur un plateau téléphonique dans la presse immobilière. Rien à voir avec la choucroute. J’ai pourtant fais ça 5 ans. Et, à ce moment là pour moi cette expérience est désastreuse car j’ai vu dans cette entreprise ce qu’on y fait de pire en terme managérial.

Rien ne vaut le terrain

En parallèle, je choisis d’aller dans le bénévolat pour garder le lien avec l’organisation d’event et je vais gérer une troupe de théâtre pendant une dizaine d’année.

Je pensais m’égarer or j’étais en train de construire mon expérience. Non seulement j’ai été formée au management, mais je connais désormais la souffrance au travail, pour l’avoir subie et faite subir. Aujourd’hui, j’ai gagné en analyse sur ce type de situation, ce qui est très précieux pour mon métier actuel. Et le bénévolat dans des assos c’est l’une des expériences les plus formatrice pour l’événementiel. Je le conseille ( fortement, très fortement ) à toute personne qui souhaite aller dans cette voie.

Le gros atouts des assos c’est qu’elles ont de grands rêves ! Elles veulent organiser un festoche au Parc des Princes avec une arrivée en hélico mais ont 500 € de budget. N’ayant pas les moyens, elles ont des idées, du sytème D, de la débrouille, de la solidarité, du collectif, des bénévoles et du réseau ! Des assos nantaises, il y en a un paquet, comme France Bénévolat, Bénénova, ou celles des festivals comme les RDV de l’Erdre, Hell Fest, atelier des initiatives, aux heures d’été… Et, participer à leurs coulisses est une chance immense d’apprendre et de se tricoter un réseau solide qui sera un tremplin ESSENTIEL dans le métier. Oui je crie ce mot en capital, j’y consacrerai d’ailleurs un article une autre fois.

C’est ton Destin

Je l’ai dit, j’ai fait un diplôme technique avec le BTS Communication des entreprises et la fac à InfoCom spécialisation NTIC. La complémentarité des 2 était assez mal vue à l’époque d’ailleurs. Pourquoi les NTIC ? Les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication. Internet n’existait pas vraiment ( ça vaaaa je les entends tes remarques …) et je me suis dit qu’il y avait un truc à jouer sur l’alliance du terrain et des internets.

Le BTS m’a apporté une réponse concrète : un pont vers une posture professionnelle . Là où l’école échouait depuis des années ( ou peut être moi qui échouait dans mon bulletin de note, ça dépend d’où on se place ) à ne pas répondre à mes attentes avec de la théorie sans le sens à mes yeux, le BTS est venu confirmer des compétences d’agilité, d’organisation, de créativité… Je parlais du métier de Chargé de projet événementiel, c’est le titre utilisé dans la plupart des diplômes actuels, il comporte souvent des modules sur la façon de gérer des projets solo ou en groupe, des méthodes pour s’organiser, et cela fait partie des compétences utiles ensuite dans notre métier. Puis la Fac est venue compléter des connaissances, de la culture générale, de la méthode… autour d’une technologie naissante.

En gros, il faut s’écouter, se faire confiance, parce que j’ai eu raison de faire ces études. Aujourd’hui, je m’appuie encore sur des connaissances acquises dans les études, dans mon quotidien. Le tout c’est de savoir faire du lien entre des connaissances acquises et des expériences terrain pour valoriser ce que tu sais faire. Ce que tu aimes faire.

S’appuyer sur ses forces, uniquement ses forces

D’après mon expérience, faire un diplôme pour un job précis ou rechercher un job précis pour se reconvertir n’est pas forcément la meilleure des choses si on doute. Parce qu’on se dit qu’on va essayer de répondre à toutes les attentes de la fiche de poste, et faire en sorte de s’améliorer pour répondre à un·e recruteur·rice.

Une fois lors d’une enquête métier, la personne m’a demandé quel était mon conseil ultime, THE conseil. Je lui ai dit qu’ « à vouloir être bon·ne partout on est moyen·ne en tout, autant réfléchir à ses forces, se focaliser dessus et les rendre puissantes. On décide avec le cœur ce qui nous plaît en restant aligné·e avec ses valeurs. »

Surprise de ma réponse, elle m’a répondu « Si on m’avait dit ce genre de chose à l’école et tenu ce genre de discours je crois que j’aurai vu les choses autrement »

La valeur de ses choix

En atelier, pendant nos jeux, c’est récurrent les questionnements autour de la carrière. Car nous venons parfois bousculer sur les raisons réelles, motivations des personnes à rester dans une entreprise ou au contraire à aller trouver sa place ailleurs.

En réalité, pour ces personnes, ce n’est pas un mauvais choix d’être dans cette structure dans laquelle elles ne se sentent pas bien. Car finalement, elles ne s’étaient jamais posées pour savoir si elles se plaisaient là où elles sont. Certaines personnes ouvrent les yeux à ce moment là, et nous en parle à la fin de l’atelier ou reprennent contact avec nous ensuite car elles ont eu le courage de prendre une décision. C’est positif. Ces personnes comprennent enfin ce qu’elles veulent. Donc même en faisant des jobs qui ne te font pas danser la lambada tous les jours, ça a sa vertu. Un temps en tout cas, jusqu’à ce que la prise de conscience soit là. Ensuite il faut faire des choix. Et faire des choix, ça nous construit.

Prendre des décisions

Notre métier événementiel d’ailleurs, c’est de prendre des décisions, au quotidien. Je n’ai jamais calculé le nombre de décisions que je dois prendre dans un événement. Ni même avant pour sa prépa, mais ça doit être l’équivalent au nombre de fois où on touche son portable ^^ Il faut accepter de faire des choix, le choix d’une reconversion pro ou scolaire, le choix de continuer dans ces études là… C’est l’une des première compétences du métier alors autant commencer aujourd’hui.

Je me souviens ado, d’un élève en 1ere ou terminale qui ne cessait de souvent nous répéter « On a toujours le choix », ça m’énervaiiiiiit. Je me disais « Mais non voyons il y a des fois où on nous laisse pas le choix, ou bien c’est insupportable dans les 2 cas… » Puis, en débutant ma carrière, j’ai enfin compris ce qu’il voulait dire. On a toujours le choix. Alors oui, les choix qui s’offrent à nous ne sont pas toujours ceux que l’on voudrait. Mais on peut aussi faire le choix de ne prendre aucun de ces choix et créer une nouvelle opportunité qui est un choix plus acceptable.

Ce qui est certain, c’est que chaque choix que j’ai fais, a fais de moi la femme que je suis.

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